[RP] Ambassade de Franche-Comté

La première question dut être réthorique car le Denfert n'eut pas le temps de répondre à la présomption que la dame l'invitait déjà à le suivre. Lui emboîtant le pas en souriant, il dit simplement :

- Je vous suis.

En marchant quelques pas, ils discutèrent rapidement du temps et de la route :

- La route fût bonne. On sent le redoux approcher car nous n'avons eu qu'une fine neige sur notre versant.

Si Néodyme boitait, il ne traînait cependant pas plus qu'un autre car nulle douleur ne l'accablait dans la jambe, les longues marches par contre pouvaient lui donner un mal de dos de tous les diables. Son pas était seulement ponctué du bruit métallique de l’extrémité de son bâton sur le sol qui évoquait une valse à trois temps qui s'offre encore le temps de s'offrir des détours du côté de l'amour … enfin bref une valse comme celle chère au Grand Jacques.

Une fois arrivés dans la dite pièce, son hôte l'invita à s'asseoir, ce que Néodyme fit en se posant sur la chaise la plus proche après avoir ôté son manteau et l'avoir posé sur le dossier de celle-ci.

- Avec ce froid une infusion serait la bienvenue. Si je puis être exigeant et si cela est possible, une base menthe poivrée et thym serait parfaite. Je vous remercie.

Si la sobriété eut du s'incarner, le Denfert eut probablement été sur sa liste des possibilités. Celui-ci ne consommait en effet que très rarement de l'alcool lui préférant infusions et décoctions savamment composées.

Une tête connue vint à pointer le bout de son nez, le comtois se leva évidemment pour le saluer d'un mouvement de tête :

Bonjour, Néodyme Denfert, nous nous sommes déjà croisés il y a quelques temps à Dole, peu après le départ des troupes françaises il me semble.

Le Denfert sourit à son tour

- Bonjour donc madame l'avoyère.

Invité à exposer les raisons de sa visite, il s'exécuta :

- Le but de ma visite est très simple, la Comté souhaite retisser des relations diplomatiques avec ses voisins. J'ai, pour ma part, tout récemment été affecté aux deux cantons helvétiques frontaliers avec notre belle province : Grandson et Genève. Par conséquent … me voilà !

Je sais que les relations entre la Franche-Comté et Genève ont été, pour le moins, tumultueuses ces dernières années. J'eus aimé pouvoir tisser ces liens lorsque j'étais, moi-même, Chancelier de Franche-Comté mais mal m'en pris car à peine en avais-je évoqué la possibilité que l'Empire, par la voix de Feue Jade et de son Chancelier Impérial, m'interdit tout contact avec l'Helvétie. Je vous passerais les détails mais pour être honnête, vous devinerez que je n'ai pas été très peiné du décès de l'Impératrice.

Cela dit, de ce passé désormais lointain faisons table rase ! Dernièrement lors du conflit avec les Français, nous avons bien évidemment remarqué que Genève s'était comportée de manière particulièrement honorable. Cela doit déplaire à Rome qui aimerait diaboliser votre canton mais les faits sont les faits. Aussi suis-je ici pour discuter des liens entre le Canton de Genève et la Franche-Comté de Bourgogne.

L'ambassadeur de Franche Comté présentait le motif de manière très diplomate et Caméliane l'écoutant consciencieusement, sans l'interrompre.

Alors entra l'un des employé de l'avoyerie avec un plateau, une théière, des pots en terre cuite contenant sûrement les herbes demandées, des gobelets d'étain et un plat contenant de la viande des Grisons, des olives, des cornichons et des Brotchen, ces petits pains alémaniques.

- Je vous remercie et m'occupe du service. C'est gentil à vous... lui dit-elle après s'être levée pour prendre le plateau. Puis elle déposa le plat entre eux trois, versa ensuite l'eau bouillante dans les timbales, répartit les simples de manière équitable, les approcha de l'Ambassadeur et de son époux d'amour, puis avança le pot de miel devant les hommes en posant sur le dessus une spatule, en équilibre. Tiendra... tiendra pas... Tiendra.

- Servez-vous messieurs.

Un sourire très amoureux à l'intention de son mari et un autre tout à fait aimable, voir même chaleureux, à l'intention de Néodyme éclaira son visage. Elle se rassit et prit un petit pain.

- Donc, vous souhaiteriez nouer des liens Monsieur Denfert. Par écrit je suppose ?

Elle déchira son Brotchen en deux morceaux...

- Je ne vous cacherai pas que je m'attendais à quelque chose de ce genre. Et je ne vous cacherai pas non plus qu'à Genève nous avons pour us de ne pas signer de traité d'entente, ni d'amitié, ni de commerce, ni d'accord judiciaire, ni d'autorisation de passages d'armées impériales...

Elle écarta les mains...

- Ceci étant dit, je peux en référer aux citoyens genevois, il est possible qu'ils souhaitent qu'un pacte s'établisse entre nos contrées. Mais avant, pourriez-vous nous en dire plus sur vos propositions exactes ?

Un petit morceau de mie fut portée à sa bouche, elle regarda un instant son époux et pencha légèrement la tête sur le côté pour l'inviter à s'exprimer à son tour...

L'Ambassadeur ajouta une cuillerée de miel à son infusion et, après s'être servi, fit glisser vers Maethor l'ensemble "spatule-pot de miel", spatule qui, couverte de miel, ne pouvait plus tenir en équilibre à présent.

- N'allons pas trop vite en besogne non plus. Vous parlez directement de rédiger quelque chose cela me semble quelque peu précipité. D'abord nous n'avons pas de Franc-Comte élu actuellement. En effet, et cela répondra en partie à votre curiosité mon cher Maethor, la Comté est bien partie pour faire deux mois sans que les conseillers élus ne puissent trouver un compromis. C'est triste mais c'est ainsi.

Pas de Franc-Comte, pas de signature. Pas de signature, pas de traité. Pas de traité … pas de traité.

Le Denfert sourit, profitant de la pause pour porter son infusion à ses lèvres.

- Pour tout vous dire, je ne suis même pas venu avec des propositions. Je suis venu pour briser la glace en faisant le premier pas, en ouvrant le dialogue.

Je n'ose pas croire que, passé le Col de la Faucille, les aspirations humaines soient fondamentalement différentes. Mon objectif, tout personnel soit-il, est donc de trouver un socle que nous partageons pour construire quelque chose ensemble, Genevois et Comtois,. Traité, pacte, contrat, laissons donc cela pour le moment et dites-moi plutôt si vous pensez que je puisse être dans le vrai et que cet objectif soit … ne fût-ce qu'envisageable.

[hrp]encore désolé pour le retard[/hrp]

Le Denfert, tout en savourant son infusion, sourit aux véhémentes paroles de l'avoyère. Après les politesses d'usage, il pouvait à présent, derrière l'émail des civilités, entrevoir la passion qui animait la jeune femme. Pour sûr qu'elle y tenait à sa liberté …

- Madame l'avoyère, je vous entends également très bien et je vous écoute même très attentivement. Vous parlez lion, baffes, valeurs, religions, politique et cela de manière très éloquente soyez en certaine. Mais au delà de toutes ces postures, de tous ces choix, il reste l'essentiel et cet essentiel c'est l'humain.

Et que souhaitent les hommes et les femmes que nous sommes ? Sans prétendre détenir la vérité absolue, je peux cependant affirmer que ce que veulent les Comtois et les Genevois c'est avant tout avoir de quoi se nourrir soi et sa famille, c'est avoir un toit pour s'abriter, c'est travailler pour se sentir utile, c'est pouvoir aller boire une bonne bière en soirée à la taverne du coin avec des amis, c'est se faire une place dans sa communauté … En bref, c'est tout simplement vivre au mieux notre épisode terrestre. Me soutiendriez-vous le contraire ? Je ne pense pas.

Nous avons probablement des divergences d'opinion sur certains points, notamment ceux que vous évoquez. Cependant,et ce jusqu'à preuve du contraire, j'ai deux certitudes : nous sommes tous humains et de ce fait, nous mourrons tous. La question est donc : que ferons-nous en tant qu'humains en attendant cette mort inéluctable ? Choisirons-nous la voie de la discorde ou plutôt celle de la concorde ?

Néodyme marqua une pause et en portant sa timbale à ses lèvres constata la vacuité de celle-ci. Déposant le godet, il se releva tranquillement :

- Bien, sur ce je vous remercie grandement de votre accueil car, malheureusement, il s'avère que je vais devoir prendre congé. Je tiens à dire que j'ai trouvé ce premier pas très intéressant et vous m'avez donné beaucoup à réfléchir en m'éclairant sur votre point de vue. J'espère pouvoir vous revoir bientôt, vous ou un éventuel successeur peut-être, mais je subodore que vous resterez dans les parages.